Dans cet essai d’image, nous voyons une représentation de ce fameux Pont mobile, avec sa partie centrale qui semble inexistante… Mais, si vous regardez bien, avec minutie, vous apercevrez que la pile centrale, ronde dans la rivière, supporte un tablier qui se superpose au tablier accroché à la rive droite, au Fort.
Sur cet extrait, carte de 1690 Des Environs de Paris, dessiné par De Fer géographe (1647-1720 Gallica BNF) on distingue bien que le Pont de Gournay est sectionné en trois tabliers dont celui du centre est manquant. (Et ce plan en trois sections est unique dans toutes les représentations de ce Pont de Gournay.)
Un petit fortin en haut pour la route allant à Chelles et en bas un ensemble de vie avec le Fort, le Château et le Prieuré. (Représentés par des petits dessins formant symboles, tous les mêmes, pour les autres lieux de cette cartographie).
Le tout évidement, pour la sécurité de l’époque, entouré de remparts avec, comme protection au Sud, les fossés du Bras Saint-Arnoult pour le Fort protégé par un pont levis…
Voici la description de ce Pont mobile de Gournay:
C’est là l’ingénieux système élaboré par le constructeur de ce Pont, qui c’est abondamment inspiré du grand Maistre Francesco di Giorgio Martini, 1439-1502, avec son inépuisable Traité des machines et engrenages servant à tout ce qui demande force et travail surhumain…
Le principe premier est que ce tablier central est « équilibré » depuis la pile ronde qui lui sert de pivot. C’est à dire qu’il s’agit de la mise en application, simple, de la « balance romaine », dont le poids est égal à droite et à gauche du pivot vertical:
Réglé par le plomb qui se trouve dans un caisson à la pointe gauche de ce tablier, ce poids de plomb A est égal à tout le tablier B central. Celui-ci peut ainsi facilement pivoter sur lui même, pour venir s’accrocher à la section Nord du troisième tablier du Pont.
Le deuxième principe, que l’on peut voir par cette image, est le procédé ancien du roulement à boules. Celui-ci va permettre, aux deux tabliers qui se superposent au dessus de la pile centrale ronde, de coulisser, en douceur sur lui même…
A, est le poids de plomb
B, le tablier tournant
C, le pivot de métal qui s’enfonce dans la pile
D, le roulement à boules
E, la pile fixe du pont dans la rivière
D, Le roulement à boules: ce plateau est de diamètre aussi grand et puissant que possible, sous le tablier. Il mesure environ 6 pieds de large, comme le plateau du tablier. Les deux parties qui le composent, la partie fixe et celle amovible, sont creusées, identiquement, d’un demi-godet pour recevoir la boule de bois F, qui mesurera environ 1pied de diamètre (fait du bois le plus dur que l’on connaisse).
(13 godets et boules au lieu de 12, n’étant pas ainsi obligé de réclamer, pour la protection divine du Pont, la bénédiction des moines du Prieuré).
Le troisième système est celui des deux chaines ( ou cordages plus facile à remplacer) qui vont permettre, depuis le quai du Fort, de faire coulisser le tablier pour le faire tourner. C’est dans la masse du bois que les deux goulottes seront creusées, pour recevoir les deux chaines, sur tout le pourtour du roulement tournant supérieur.
Les deux chaines sont tenues par les anneaux de métal vissés dans la masse du bois.
Dans l’image dessiné du Pont, on voit que deux soldats sont à la manoeuvre avec les poulies sur le quai de droite. Ce sont eux qui règlent à volonté et en coordination, le tablier mobile, sur l’ordre immédiat du Chef de surveillance du Pont (en cas de danger) situé en hauteur sur la nacelle servant de tour de guet.
Sur cet exemple on comprend son fontionnement:
Si l’on enroule la chaine N° 2 sur le treuil du quai, le tablier se déplace seul, en demi rotation circulaire, pour aller se bloquer sur la rive Nord du pont, ainsi il est « Ouvert «.
A l’inverse, quand on treuillera la chaine N°1, le tablier reviendra à sa position « Fermé-sécurité ».
Le rendement, pour la précision de l’ajustement entre eux des trois tabliers du Pont, sera fait en inversant ces tirants en direction des treuils sur le quai.
Ce travail d’ouverture-fermeture du Pont peut également servir pour le passage des barges de transport trop volumineux en période de niveau élévée de la rivière. La Marne à Chelles-Gournay ayant une différence de niveau d’eau « été hiver » pouvant atteindre plus de 12 pieds de haut.
Au delà devient possiblement une crue catastrophe pouvant emporter l’édifice entier…
(Nota: le SUIF de boeuf sera prescrit pour graisser les goulets, les boules et les treuils, avant chaque hiver de préférence)
(Petite précision sur les mesures anciennes: 1 pied = 33cm environ.
On ne comprend toujours pas pourquoi l’auteur de ce texte s’évertue à donner des mesures en pieds ?)
Représentation de Gournay par Claude de Chastillon 1559-1616 donc la plus ancienne vue connue avec ses fortifications, cette image pose un vrai problème de volume, d’habitat de constructions et d’eau autour du Fort ? ( voir la PAGE 12 )
https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k1523713w#
Si cela était vrai, nous aurions alors le Prieuré inclus dans l’enceinte. De haut en bas, Pont sur la Marne, Pont sur le Bras Saint Arnoult et pont levis sur le rempart de l’enceinte Sud qui longe le ru de Nesle ? Mais aucune description historique ne nous donne une ville aussi importante ?
Pont levis sur le Bras Saint Arnoult à l’époque du Fort de Gournay:
Les fourches patibulaires, les potences et les gibets… (collage reconstitution d’après des images de la BNF)
Lectures complémentaires et diverses de Claude Schwartz, que nous remercions, au sujet de ce pont et du dénombrement, par le passé, de la population de Gournay. Il s’agit vraiment d’un autre monde que l’on peine à imaginer tant le vide d’humains régnait dans les paysages des siècles décrits dans ces pages…
(Voir plus loin, en 1709 pour la ville de Vaires : 8 Feux !)
A Gournay vu la piété et l’honnêteté des sujets, je pense qu’une potence à deux cordes devait amplement suffire.
Et puis si le seigneur voulait punir des bateliers de passage particulièrement, malhonnêtes, impies ou malpolis, on pouvait toujours ajouter des cordes de pendu sous les arches du pont en cas de besoin. Il y avait aussi la menace d’enfermer les malhonnêtes gens dans
la léproserie de Gournay (route de Champs) qui devait être bien dissuasive.
Ce pont à péage sur la Marne est depuis toujours une source de rentabilité pour les seigneurs du Fort de Gournay. L’autre solution pour traverser la rivière, le bac, il n’est pas non plus gratuit !
Sur la place du Fort, après l’entrée Sud par le Pont levis sur le Bras Saint Arnoult
( de Claude Schwartz sur ce pont de Gournay):
Suite au sujet de ce pont:
Et si le grand Léonard n’écrivait sur ses dessins qu’à l’envers, simplement pour ne pas être confondu avec son prestigieux prédécesseur qui lui n’écrivait qu’à l’endroit, comme on peut le constater sur ce dessin ?
(A, est un oeil)
Ainsi, première leçon du Maistre, pour penser construire un pont sur la Marne, commençons donc par en mesurer sa largeur…
Dessin extrait du : Traité d’architecture de Maistre Francesco di Giorgio Martini
ci dessous études de treuils et d'élévateur par Giorgio Martini
Ci dessous Pont mobile par Léonard de Vinci et étude de poids
(dans le codex-atlanticus. ambrosiana)
Habitants de France en 1709:
https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k822835/f4.item
35 feux pour Gournay correspond ainsi à la description d’Hector Malot qui voit, lors de son passage dans ce village en 1875, (un siècle et demi plus tard) « entre vingt et trente maisons… »
http://www.lemarneux.fr/2023/06/hector-malot-et-le-moulin-flottant-de-chelles.html
Champs 42
Chelles 210
Noisiel 29
Gournay 35
Vaires 8
C’est encore Delagrivre en 1740 qui donne le meilleur positionnement du Bras Saint Arnoult ainsi que du ru de Nesle ici en Y, qui sert sur sa droite de frontière avec Champs et sur sa gauche à alimenter en eau le Bras Saint Arnoult. Le pont sur la Marne n’existait plus à cette époque on traversait avec le bac. Le pont sur le Bras Saint Arnoult est bien représenté. En fait c’est la première cartographie réelle des lieux, qui ne se contente pas de représentation par petits symboles.
De plus c’est aussi la première carte au Monde positionnée au Nord géographique, quand toutes les autres sont aléatoires ou bien positionnée avec une boussole, c’est à dire au Nord magnétique…
Le Pont qui traversait la Marne a été gommé par De Fer, pour sa mise à jour de la carte de Gournay en 1728 ?
Contrairement à sa carte de 1690 (du Pont mobile), il montre bien ici que le Bras Saint Arnoult est important au point de former une île autour du château. Le seul pont restant au sud étant probablement un pont levis, car le Bras n’est pas très large à cet endroit.
Les définitions des petits symboles en 1728 se sont diversifiées, au point de faire une distinction entre les lieux où sont les Hommes, des habitations où sont les Filles, dans les Abbayes, les Prieurés, les Couvents ou encore les Monastères.
Constatation d’un moulin par la petite roue sur la rivière à coté du Château
Lucien Follet
lectures sur le sujet du Gournay ancien:
Elle a passé le pont de Gournay. Elle a bu sa honte
l'Eglise du Prieuré de Gournay